lundi 26 septembre 2011

Stress au bureau dans la bande dessinée : "Les Winners"

Avec « Les Winners », la BD explore à nouveau le champ du monde du travail, sa lutte sans rémission pour la survie, et ses accès de violence dus à un stress quasi permanent. Si les personnages sont un peu caricaturaux et les situations plutôt convenues, il n’en reste pas moins que l’analyse des comportements se base sur des attitudes visibles en entreprise. Le plus bel exemple en est la planche page 12 qui nous montre un coach bourré de certitudes en pleine action, mais finalement en plein doute une fois  allongé sur le divan de son psy. Ce qui me rappelle un sondage vu il y a quelques années (Courrier Cadres N° 28 Mars 2009) qui nous enseignait que « un salarié sur deux déclare jouer un rôle au travail », et « avoir un comportement différent dans la vie privée de celui adopté en contexte professionnel ». Une duplicité qui peut être une des causes du mal être au travail.



Les Winners – Tome 1 – « Aucune perte » – Bruno MadauleBamboo Edition

mercredi 31 août 2011

La personne aux deux personnes : conditions de travail au cinéma

Toujours dans le contexte professionnel, "La personne aux deux personnes" avec Daniel AUTEUIL et Alain CHABAT, utilise par contre les ressorts du fantastique. A la suite d'un accident de voiture, l'esprit d'un chanteur ringard des années 80 investit le cerveau d'un modeste employé de la COGIP, Jean-Christian RANU. Celui-ci, "placardisé", fomente la nuit des vengeances oniriques. Gilles GABRIEL, le chanteur, ou plutôt son âme, pense être arrivé en enfer, mais en vérité c'est l'enfer des bureaux d'une entreprise de la défense et son univers impitoyable.
Car chacun est "seul au milieu des autres", comme la DRH (
Marina FOIS) qui se démène pour faire sa place dans le cadre de la fusion de la COGIP avec un groupe hollandais. Et même au cours d'un séminaire de motivation collective (team building), chacun ne peut compter que sur lui même. Sauf notre "petit comptable" coaché par Gilles GABRIEL. Ce dernier saura-t-il, de son côté redevenir un chanteur "in" ?Nicolas et Bruno, les réalisateurs qui étaient les adaptateurs de "The Office" avec François BERLEAND, ont pris le parti de la comédie humaine, avec pour décor le monde de l'entreprise. Une entreprise en rien fraternelle et citoyenne, remplie de codes, qui "placardise", et dans laquelle les salariés passent 70 % de leur temps éveillé.Courrier Cadres Juin 2008 - Eric NAHON.

mercredi 17 août 2011

Conditions de travail dans la chanson : l'industrie métallurgique pour Yves Montand et Bernard Lavilliers

Les références à l'industrie lourde sont certainement nombreuses, mais puisqu'il faut bien commencer, nous commencerons par une simple allusion à la condition du "tourneur chez Citroën", évoquée par Yves Montand dans "Les grands boulevards (Paroles: Jacques Plante. Musique: Norbert Glanzberg   1952 © MCA Caravelle). "Pas riche à millions" et ne pouvant pas se "payer des distractions" du moins " pas
Tous les jours de la semaine", son plaisir "dès le travail fini" est d'aller se promener sur les grands boulevards pour y jouir du spectacle de la rue.


Yves Montand - Les grands boulevards par Salut-les-copains

Plus près de nous, Bernard Lavilliers, fils d'ouvrier qui a lui même travaillé à la Manufacture d'armes de Saint-Etienne, nous chante la complainte d'un sidérurgiste dont l'entreprise a fermé, mais qui voudrait, comme le dit le refrain "Travailler encore" l'acier rouge de ses "Mains d'or" qui donnent le titre à ce succès de 2001.
Malgré des conditions de travail pénibles, "J'ai passé ma vie là - dans ce laminoir, Mes poumons - mon sang et mes colères noires", la perte de l'emploi est dramatique. Perte du moyen de subsistance, peu rémunérateur, "J'me tuais à produire, Pour gagner des clous", perte de statut social , "J'peux plus exister là, J'peux plus habiter là" ou "Je sers plus à rien - moi Y'a plus rien à faire" , la logique financière est pourtant implacable, la fabrique doit fermer "Tombés sur le flan - giflés des marées
Vaincus par l'argent - les monstres d'acier" et les effets demeurent incompréhensibles pour les ouvriers : " Quand je fais plus rien - moi Je coûte moins cher - moi Que quand je travaillais - moi D'après les experts"


Bernard Lavilliers - Les Mains D'Or par Bernard-Lavilliers







dimanche 10 juillet 2011

Notre univers impitoyable (Film - 2008): vie de couple et compétition

Thierry LHERMITTE, à l'affiche de "L'invité", est aussi au générique de "Notre univers impitoyable" (Léa FAZER - 2008), non plus dans la peau d'un consultant fantasque, mais en tant que patron d'un cabinet d'avocats d'affaires, dans lequel officie une jeune couple, dont seul l'un deux pourra devenir associé. C'est le départ du scénario, qui s'évertue à montrer les conséquences successives de la nomination de l'un ou de l'autre des jeunes juristes à la tête de l'éxécutif de l'entreprise. Madame semble partir avec un handicap, car lors des réunions, par exemple, c'est toujours elle qui est chargée de servir le café. Souffrant d'un manque de reconnaissance, elle doute de ses capacités, et doit faire ses preuves quand son patron lui confère le statut d'associée. Et quand c'est son mari qui hérite du titre et de la charge tant convoités, et puisqu'il a du mal se passer de Margot, celle-ci prend de la distance avec son travail, refuse de travailler plus que nécessaire, et elle adopte un temps partiel pour mieux s'occuper des enfants.
Eric NAHON, de Courrier Cadres ne le met pas en avant, mais la discrimination liée au sexe parait l'un des principaux points de réflexion proposés par la cinéaste. En effet, Léa FAZER explique qu'avec ce film elle veut faire réfléchir le spectateur sur la résistance d'un couple face à des situations professionnelles, et curieusement, pour elle l'un ou l'autre des deux aurait dû démissionner suite à la promotion de son conjoint. S'inspirant d'une histoire réelle vécue par un couple de médecins, e"lle pose des questions, sans chercher à imposer de réponses", mais Eric NAHON se demande alors pourquoi elle choisit de faire refuser la promotion à chacun de ses personnages, interprétés par Alice TAGLIONI et Jocelyn QUIVRIN, alors en couple à la scène comme à la ville, avant la disparition de ce jeune et prometteur acteur.
Courrier Cadres Février 2008 - Eric NAHON

dimanche 22 mai 2011

Pollution industrielle en Italie dans la BD "Etat de veille"

ETAT de VEILLE (Morti di sonno)– Davide REVIATI – Casterman – 28 € - Prix du meilleur album au festival de Naples en 2010.
Etat de veille ne décrit pas les conditions de travail, mais l’industrie est bien présente puisque cette BD relate les errements d’une bande d’adolescents italiens, dans années 70, reclus dans un espace délimité par l’usine toute proche et les canaux d’écoulement de cette fabrique de produits plastiques.
Seules quelques vignettes laissent imaginer le travail des pères de ces jeunes gens, et l’atmosphère hautement toxique dans laquelle ils opèrent, à l’ANIC (Agenzia Nazionale Idrogenazione Combustibili), qui immanquablement rappelle l’usine tristement célèbre de la catastrophe survenue à Seveso. Il est aisé d’imaginer que le consortium qui a implanté ce complexe industriel a également édifié le village, spécialement pour ses salariés, puisque moderne et situé au milieu de nulle part, nul monument ancestral n’y est visible, église, château, hôtel de ville …
Les habitants vivent au rythme des alertes à la pollution, les mères, inquiètes que leurs enfants puissent être intoxiqués, connaissent aussi l’angoisse de l’attente et craignent l’accident de travail qui leur enlèverait leur époux.
Occupant le plus clair de leur temps à jouer au « calcio » (football), les garçons n’ont que peu conscience du risque, et s’ils connaissent par cœur les symboles de prévention et les pictogrammes imprimés sur les bidons de produits chimiques voisins, ils s’amusent des noms de ces composés hautement toxiques (page 131) qu’il identifient à l’odeur : la « punaise écrasée » pour l’ammoniaque, la « pisse de chat » pour l’acétylène, « gomme et sucre brûlés » pour le phénol, mais aussi le PVC, le PCM, le chlorure de vinyle, l’acrylonitrile,, le Perkadox, le tétrachloréthane, le toluène diisoxyanate, le peroxyde d’hydrogène. Des parfums si familiers à leurs narines que les exhalaisons d’une dépouille de chat en décomposition leur parait autrement plus insupportable.
La plupart de ces « ragazzi » finiront par partir pour d’autres horizons, bien que la firme pourvoie certainement à leur avenir. D’autres, au contraire, resteront dans cette ambiance étrangement marquée par une quasi-absence des jeunes filles.
Pour une analyse plus détaillée de cet ouvrage, nous vous recommandons l’excellent article de Yvan sur http://www.coinbd.com/
Les conditions de travail à la télévision : Une nouvelle mouture … pour Caméra Café, et une Sitcom avec de vrais salariés

# 01 Une Sitcom avec de vrais salariés

Le succès de Caméra Café (voir ci-dessous ) ou de Brother & Brother aidant, la société belge Ebuco exploite le filon des séries dont le bureau est non seulement le cadre, mais aussi l'objet des scènes et des situations. Les particularités de cette création qui s'appelle TMFB pour The Marvellous Flying Box, c'est son nom, sont que la sitcom est diffusée pour l'instant sur Internet, et que le producteur propose à des sociétés commerciales de sponsoriser la série, et même de prendre pour acteurs les salariés de ce mécène, qui peut également participer au scénario.
Les arguments sont séduisants, puisque l'humour de TMFB attire le public, et qu'au final le coût de cette opération est inférieur de 20 à 80 % à une campagne de publicité classique, pour des ventes qui peuvent augmenter de 30 à 35%.
Le ton semble aussi caustique que Caméra Café, tout aussi critique que la série française, et comparable dans ca capacité à analyser nos comportements en milieu professionnel. La différence cependant, est que pour la série belge, la caméra est située dans l'ascenseur, ce qui explique le "Flying Box" figurant dans le titre. La série pourrait arriver sur le marché français, mais pour l'instant, preuve de son succès, 2 chaines du groupe RTL se sont portées acquéreuses du contenu.
Courrier Cadres - Eric NAHON – Avril 2009.

# 02 Caméra Café : la saison 2.
Jean-Claude CONVENANT et ses collègues ne pouvaient en rester là. Après la formidable audience rencontrée dans le monde entier par la série culte de M6, les producteurs, auteurs et acteurs dont Bruno SOLO se retrouveront derrière ou devant la "machine à café", pour une diffusion annoncée cette année.
Bien qu'en 5 ans les personnages aient évolué, les archétypes des protagonistes et les caricatures demeurent, exacerbées par le "travailler plus pour gagner plus" de circonstance.
Cette nouvelle mouture éclipsera peut-être le succès mitigé du film sorti en février dernier, et qui voyait nos personnages de la sitcom se retrouver "dans le Saint des Saints ", La Défense, pour un séminaire de motivation et de Team building.
Courrier Cadres - Eric NAHON - Octobre 2008.

lundi 11 avril 2011

"Seule" : un téléfilm sur le suicide au travail


« Seule » Fabrice CAZENEUVE – France 2 - Mercredi 05 novembre 2008.
C’est sous la forme d'une fiction que Fabrice CAZENEUVE traite du délicat sujet du suicide au travail, avec cependant quelques séquences qui pourraient être directement extraites d'un documentaire. C’est par exemple une série de témoignages de salariés de l'entreprise dans laquelle travaille la victime interprétée par Jean-Pierre LORIT, et son épouse, Brigitte, magistralement incarnée par Barbara SCHULZ. Au delà de l'aspect dramatique parfaitement traduit, la force de ce téléfilm se situe dans sa capacité à montrer que les salariés, managers essentiellement, passent alternativement de l'état de victime à celui de bourreau et inversement. L’autre approche, nouvelle, est de montrer que chacun est enfermé dans son rôle, pour preuve, le comportement des différents personnages :
- les collègues de Brigitte qui allèguent que son mari était sous-pression, surmené, qu'il travaillait beaucoup, et qui plus tard laissent entendre que c'est elle qui, peut être, est en partie responsable du mal être de son mari. C'est l'attitude du rival qui va jusqu’à déclarer que son malheureux collègue lui avait confié regretter un amour de jeunesse. Ce même collègue qui avouera que c'est la pression de l’entreprise qui induit son comportement
- les syndicalistes qui encouragent Brigitte à entamer une action, mais qui quand elle s’y résout, lui reprochent de ne pas respecter la démarche qu’ils préconisent
- le PDG de l'entreprise, assisté de son DRH, assez humain au début, puis qui peu à peu cherche à dégager sa responsabilité, d'autant plus que l'entreprise a déjà connu d’autres suicides de salariés
- le DRH qui tente de se justifier, qui soutient que "le stress est facteur de la performance", qui dans une situation concurrentielle génère de l’énergie ; et lui aussi tente de renvoyer la responsabilité vers l’épouse
- La veuve d'une autre victime du travail de l’entreprise, qui est la seule à comprendre Brigitte, mais lui laisse peu d'espoir sur l'issue d'une action en justice
- la famille de Brigitte, qui a du mal à la soutenir, ou maladroitement, comme l'essaie son père, ancien ouvrier, virulent envers l’entreprise.
Enfin, la séquence « documentaire » reprend les expressions habituellement entendues quand il s'agit de parler de stress au travail :
- Besoin de reconnaissance
- Nous sommes évalués en permanence
- Le monde du Travail à changé
- Le système de management est oppressant
- On travaille avec la haine au ventre
Finalement, Brigitte se lancera dans procédure juridique dont le résultat s'avère bien incertain.

Samuel DOUHAIRE de Télérama rappelle que Fabrice CAZENEUVE était déjà l’auteur d’un téléfilm choc sur le harcèlement moral, « De gré ou de force », et que dans « Seule », il a su très bien décrire « les impacts du discours managérial qui transforme les employés de bourreaux en victime consentantes du capitalisme mondialisé » de manière « aussi pertinente que glaçante ».
Hasard du calendrier, Barbara SCHULZ et Jean-Pierre LORIT étaient fin octobre au CADO d’Orléans pour la pièce « En toute confiance » de Donald Marguliès, adaptée et mise en scène par Michael FAGADAU.

samedi 2 avril 2011

Comment Bretagne Ateliers gère ses compétences : un documentaire de France 5 sur l'intégration des travailleurs handicapés

© Camera Lucida
Bretagne Ateliers est un sous-traitant exemplaire. Au titre de la qualité de ses productions, du respect des délais imposés par ses donneurs d’ordre, bien entendu, mais bien plus encore sur la gestion des emplois et des compétences qu’elle a mise en œuvre.
L’originalité de la démarche c’est qu’elle repose avant tout sur les compétences des salariés, et seulement ensuite sur les compétences nécessaires à chacun des postes de travail. L’homme est au centre de l’organisation, le poste de travail est adapté aux compétences de celui qui l’occupe. C’est aussi l’organisation du travail qui va pallier les carences ou les absences des opérateurs, fréquentes et récurrentes. Car la particularité des 650 salariés de Bretagne Ateliers, c’est que 80 % d’entre eux sont des travailleurs handicapés. Si l’entreprise, qui livre des sous-ensembles à Citroën et Alstom, est soumise aux contraintes de tout sous-traitant de l’automobile ou de l’industrie ferroviaire, elle dispose d’un encadrement spécifique composé d’éducateurs et de formateurs. Une structure lourde, financée par les clients, qui paient les prestations certainement plus cher que chez un autre sous-traitant, mais s’acquittent ainsi en partie de leur obligation d’employer l’équivalent de 6 % de travailleurs handicapés dans leurs effectifs.
Cette gestion des compétences est donc particulière, inhérente à la qualité de ses salariés, mais la leçon à retenir, c’est qu’elle privilégie la performance collective plutôt que la performance individuelle. Trop souvent les entreprises partent de la définition du poste et s’attachent à faire coïncider les savoir-faire des salariés à ce poste, alors qu’une vision générale des compétences utiles à l’entreprise permet d’appréhender l’organisation du travail globalement, et de tenir compte des limites de ces salariés.
En exergue du documentaire diffusé récemment sur France 5, Jean-Pierre LEGOFF, sociologue au CNRS rappelle d’ailleurs que chaque individu est différent, d’où, l’importance de la qualité humaine, mais que malheureusement, dans notre monde économique, l’échec et l’expérience de l’échec n’existent pas.
La démarche de Bretagne Ateliers constitue une vision idéale, difficile à appliquer avec les niveaux actuels de productivité exigés. La société devra quant à elle, surmonter un autre challenge : assurer du travail à ses effectifs dans une période économique difficile où la demande se fait plus rare.
Le documentaire sur Bretagne Ateliers « Direction des richesses humaines » a été diffusé sur France 5, en  février 2010.

lundi 28 mars 2011

Festival Ciné-Droit à Sceaux


La ville de Sceaux, la faculté Jean Monnet (Université Paris-Sud 11) et le cinéma d'art et d'essai Trianon organisent le festival Ciné-Droit, une rencontre "qui repose sur une idée originale qui consiste à mêler les publics et mélanger les genres, en abordant le droit tant sous ses aspects techniques et scientifiques que dans sa dimension sociale, voire culturelle, à travers l'analyse universitaire et le cinéma. "
Au programme :
  • The navigators
  • Entre nos mains
  • Une entreprise comme il faut
  • La classe ouvrière va au paradis
  • Rosetta
  • J'ai très mal au travail
  • Ressources humaines
  • Les Lip, l'imagination au pouvoir
  • A l'Ouest des rails
A partir du 1er avril 2011.

samedi 26 mars 2011

Accident du travail en Italie : le célèbre chanteur Adriano CELENTANO s'engage contre les "morts blanches"

Accidents du travail : l’Italie frappée par « les morts blanches »

#01 A la radio
#02 Dans la presse écrite
#03 Les morts blanches, un sujet qui n’est pas nouveau


# 01 A la radio
Le phénomène a une importance telle que les italiens lui ont donné un nom : « les morts blanches ». Il est ainsi baptisé en raison du silence qui le caractérise, et concerne les trop nombreux décès intervenus suite à un accident de travail. L’Italie en déplore plus de 1 000 chaque année, et rien ne semble changer malgré une campagne de sécurité destinée à choquer. Elle met en scène un homme qui dit « au revoir » à son fils, une dernière fois avant de partir au travail.
Nos voisins attendent cependant beaucoup du procès qui s’est ouvert à Turin le 15 janvier dernier, suite à un incendie survenu dans une usine ThyssenKrupp de la région, et qui aura coûté la vie à 4 personnes. Cette affaire constitue un symbole des accidents du travail, phénomène de société, et elle met face à ses responsabilités l’administrateur délégué de Thyssen, jugé pour homicide volontaire, ainsi que 5 autres personnes, également inculpées pour homicide.
C’est une décision historique selon l’une des victimes du drame, actuellement en soins psychiatriques, qui explique que l’équipe avait fait ses 8 heures, mais, en raison d’une erreur de planning, ou pour une autre raison, l’équipe de relève ne s’est pas présentée à l’heure convenue. Selon le règlement en vigueur, les salariés en poste ont l’obligation de remplacer les collègues, bénéficiant alors ensuite d’une journée de récupération.
L’affaire Thyssen a suscité une grande émotion, elle impose de revoir les choses. Elle rappelle le drame du Moulin de Fassano toujours près de Turin, qui avait fait 5 morts ; et Thyssen n’a rien changé.

Dans l’analyse des causes, la responsabilité de l’entreprise est souvent écartée ; on évoque la fatalité. Antonio BOCCUZZI, victime de l’incendie de Turin, est suivi par un psychiatre. Le drame de l’aciérie l’a convaincu de se lancer dans la politique pour lutter contre ces « morts blanches », ainsi qu’elles sont appelées en Italie. Il recommande de ne pas parler de mort blanche, « car il n’y a rien de blanc dans la mort d'un travailleur ».
Paola AGNELLO, secrétaire confédérale de la CGIL, estime que chaque accident est prévisible et espère que la responsabilité de l'entreprise sera engagée. Sans pour autant tomber dans la persécution des employeurs.
Le journaliste de France Inter, Eric VALMIR, correspondant permanent à Rome, invoque aussi d’autres causes, comme le nombre d’heures travaillées, mais aussi l’économie souterraine. Paola AGNELLO considère qu’il ne faut pas sous-estimer les maladies professionnelles, les risques cancérigènes, l’amiante.
Pour lutter contre l'économie souterraine, les moyens manquent, il n’y a pas assez d’inspecteurs du travail. Certes, précise Eric VALMIR, tout existe, les lois, les structures …, mais, par exemple, les inspecteurs ne sont pas rattachés au Ministère du travail. Et il n’y a que 1 900 techniciens, c’est insuffisant ; un contrôle intervient en moyenne tous les 33 ans, alors que la durée de vie moyenne d’une entreprise est de 12 ans.
Il faut faire de grandes choses, la vague émotive est telle que le Président de la République, Giorgio NAPOLITANO a déclenché une alarme sociale, publique et privée.
Une nouvelle campagne de communication ne plait pas à la CGIL, l’un des principaux syndicats du pays, car elle demande aux travailleurs d’être plus attentifs, alors que le syndicat considère que c’est bien l’entreprise qui est responsable, il ne faut pas transférer cette responsabilité sur les ouvriers.
De leur côté, les entreprises se défendent, en arguant qu’elles sécurisent leurs entreprise, qu’elles font le maximum.


# 02 Dans la presse écrite
De son côté, Entreprises et Carrières, qui traite également de ce qui restera « l’affaire Thyssen », revient sur la campagne nationale de communication, lancée le 07 octobre dernier, 5 jours avant la journée nationale consacrée aux accidents du travail, instituée il y a 58 ans.
Le défaut de prévention remonterait au boom économique des années 60/70, qui a vu de très nombreuses embauches dans les secteurs de l’industrie et du bâtiment, sans aucune culture du travail et de la prévention en termes de sécurité. C’est du moins la théorie avancée par Pietro MERCANDELLI, Président de l’ANMIL, association nationale des mutilés et invalides du travail, pour expliquer les bilans médiocres de nos cousins transalpins en matière d’accidentologie.
Tout comme Eric VALMIR, de France Inter, Anne Le NIR, correspondante du magazine à Rome confirme que le cadre règlementaire « n’a rien à envier aux autres pays européens », comme la Grande Bretagne qui observe un taux de mortalité six fois moindre qu’en Italie.


Mais c’est dans leur applications que les lois font défaut, même si le nombre d’inspecteurs est de 3500 pour 6 millions d’entreprises, le risque pénal pour l’employeur est infime, en partie à cause de la complexité du système judiciaire.
C’est la même carence d’application qui touche les décisions prises par l’ex-gouvernement PRODI, qui instaurait de nouvelles obligations dans le cadre des appels d’offres, et esquissait une sensibilisation dès la formation initiale.
Entreprises et Carrières met aussi en exergue la négligence des salariés eux-mêmes, qui n’utilisent pas toujours les équipements de sécurité mis à leur disposition, et le manque de formation amplifie les risques.
Des risques que ne peuvent pas toujours refuser des ouvriers parfois en situation irrégulière, jusqu’à 60 pour cent sur certains chantiers, commente Rita CHIAVARELLI, qui dirige l’INAIL, institut national pour l’assurance contre les accidents de travail. Cette structure indemnise les victimes et leur famille, selon un système en vigueur depuis 1965 qui ne leur permet pas de vivre dans des conditions décentes. La revalorisation de cette assistance qui bénéficie à 130 000 veuves ou orphelins et 800 000 invalides, est l’un des chevaux de bataille de l’ANMIL, appuyé par les syndicats ; les autres revendications portent sur l’accroissement du nombre d’inspecteurs et l’intensification des contrôles.
Mais pendant ce temps, comme conclue Anne LE NIR, le macabre décompte continue : 6 personnes dans diverses entreprises d’agriculture, de menuiserie, du bâtiment, de transport et sur l’autoroute sont décédées au travail les 10 et 11 novembre dernier, puis le 14 un ouvrier de FIAT subissait le même sort à CASSINO, et un autre en Lombardie sur un chantier de construction.
Sources : France Inter« Et pourtant elle tourne » du 26/11/2008 – Entreprises et Carrières du 25/11/2008 .


#03 Les morts blanches, un sujet qui n’est pas nouveau


Le showbiz italien se mobilise contre « les morts blanches », à l’image d’Adriano CELENTANO. En août dernier, le célébrissime chanteur a rejoint l’association Articolo 21 qui lutte contre ces « morts blanches ». L’artiste, à l’occasion du dernier festival du film de Venise, a ressorti son film de 1975, « Yuppi Du », qui prenait déjà position contre des conditions de travail inacceptables. Celentano déplore que « 33 ans après, la situation n’a fait qu’empirer ». Venise était aussi le point de départ d’une caravane, affrétée par Articolo 21, qui a parcouru une partie de l’Italie, en s’arrêtant dans des villes symboles de la lutte contre les accidents du travail, souvent le théâtre de décès d’ouvriers. La Mostra a également programmé dans la section « Orizzonti » « La fabbrica dei tedeschi » (l’usine des allemands) de Mimmo Calopresti, réalisateur de premier plan, et « Thyssenkrupp Blues » de Pietro Balla et Monica Repetto, un autre documentaire. Ces deux films traitent de la tragédie survenue à Turin, alors que le « Yuppi Du» du chanteur transalpin explorait les conditions de travail de la grande zone d’activités portuaires, chimiques et pétrolières de Marghera, une commune limitrophe de Venise.
Les syndicats italiens, CGIL, CISL et UISL en tête, se sont réjouis de cette mobilisation qui vise à faire de leur pays une nation à l’avant-garde en matière de sécurité de travail.

Source : La Repubblica Fernando Cotugno – 11/08/2008

dimanche 20 mars 2011

Conditions de travail au cinéma : dans "Les Irréductibles", les salariés retournent à l'école

Dans Les irréductibles (2006), le film de Renaud Bertrand, c'est le thème de la sous-qualification qui est abordé. Le scénario narre l'histoire de 2 employés d'une fabrique de tonneaux qui, suite à la fermeture de leur entreprise, reprennent le chemin de l'école afin d'obtenir le baccalauréat, bagage minimum pour être pris au sérieux par l'ANPE (Pôle Emploi aujourd'hui). Selon Télérama (N°2944), qui donne une critique plutôt positive du film, "le script aurait gagné à moins s'éparpiller en intrigues secondaires : un père préparant son bac dans la classe de son fils redoublant, ça ne marche qu'à moitié". Mais pour Entreprises et carrières (N°816), " à noter la belle prestation du patron retraité, victime comme ses ouvriers de la mondialisation, qui s'improvise coach de choc pour nos aspirants bachelier". Ce dernier rôle est l'objet "d'une belle prestation de Rufus" (Télérama), les autres interprétations principales sont de Jacques Gamblin et Kad Merad.

En résumé, un sujet pas totalement nouveau depuis Le trou normand de Jean Boyer (1952), la nouveauté eut été de faire obtenir le baccalauréat à nos deux protagonistes en mettant en équivalence leurs acquis professionnels, grâce à la VAE (Validation des Acquis de l'Expérience). Mais quant à en faire un scénario c'est beaucoup moins palpitant !

mardi 15 mars 2011

Les Conditions de travail font leur cinéma : "Ma mondialisation", un film de Gilles Perret

Bien qu'il ne décrive pas directement les conditions de travail, en mode réel ou fictif, le film de Gilles Perret "Ma mondialisation", sorti le 15 novembre 2006, s'inscrit pleinement dans la réflexion de ces dernières années sur les mutations qui touchent l'industrie française. A partir du résumé du film, il est aisé d'anticiper les difficultés que rencontreront les salariés de ces entreprises concurrencées par des sites de production tchèques ou chinois, et déjà rachetées par des fonds de pension.
Entreprise & Carrières reprend en grande partie le dossier de presse disponible sur le site officiel du film, qui contient également une interview du réalisateur : "Fonds de pension, délocalisation, mondialisation font désormais partie de notre langage quotidien, mais demeurent des notions abstraites, souvent angoissantes. À travers le regard plutôt « atypique » d’un chef d’entreprise de la vallée de l’Arve, haut lieu de la mécanique de précision en Haute-Savoie, Ma mondialisation raconte cette phase récente du capitalisme dominé par des mécanismes financiers « globaux » et implacables. Incapables de faire face à cette nouvelle donne, nombre d’entrepreneurs de la vallée de l’Arve finissent par se demander s’ils n’ont pas été dépassés par un modèle économique qu’ils auraient trop longtemps cautionnés".

Source : Entreprise & Carrières n° 834 du 04 décembre 2006

Le site officiel du film



dimanche 13 mars 2011

"Someone's gotta go" : quand la réalité rejoint la Téléréalité dans le monde du travail


L’émission n’est encore qu’à l’état de projet, mais étant donné le peu de scrupules des diffuseurs, il ne serait pas étonnant de la voir un jour sur le petit écran. Dernière idée en date de la principale productrice de reality shows en Europe, la néerlandaise Endemol, « Someone’s gotta go » littéralement, « quelqu’un doit partir », va encore un peu plus loin dans l’abjection. Le concept consiste à enfermer des collègues de bureau, pendant un temps déterminé, dans un espace confiné. De vrais collègues d’entreprise ! L’objectif est de les éliminer tour à tour, en espérant les voir « s’entretuer » professionnellement, et en misant sur les rancœurs et frustrations qu’ils n’ont pas manqué d’accumuler entre eux au fil des ans.
Et gare à qui « aura passé des communications personnelles ou passé trop de temps à prendre un café pendant les heures de travail ». Mais, sous l’œil d’un business expert, vous pourrez à votre tour dénoncer les problèmes caractériels de vos voisins de bureau, leurs baisses de productivité, ou les inégalités de salaires. Une lutte sans merci dont le verdict est le licenciement, mais Endemol ne précise pas si celui-ci est réel. « Someone’s gotta go » qui n’est pour l’instant qu’un concept destiné aux marchés américain et anglais, a été présenté discrètement au MIP TV de Cannes au printemps dernier. Le teasing, cependant très racoleur, à l’image d’Endemol, était axé sur des messages tels que « jusqu’à présent au travail, il était préférable de ne pas dire la vérité » avec pour bande son « Under pressure » de David BOWIE ; ou encore « votre vie est en jeu », la vie professionnelle, bien entendu. D'un autre côté, une video montrait l’acteur Michael KEATON envoyer au diable un interlocuteur téléphonique, rappelant une scène vécue au bureau.
L’américain Fox Television s’est portée acquéreur du concept, mais n’étant pas sûre de pouvoir le lancer en ces temps de crise économique, elle a également acheté, à titre de lot de consolation, une autre émission : « More to love » (Encore plus à aimer). Celle-ci alloue à des cœurs solitaires en (fort) surpoids de se rencontrer. Dans l’ignominie, il n’y a pas de limites …
Source : La Repubblica – Jeudi 09 avril 2009.

vendredi 11 mars 2011

Les conditions de travail dans la littérature : Les heures souterraines (Delphine de Vigan)



Si le harcèlement moral dans un contexte professionnel a été démonté par des psychiatres à l’image de Marie-France HIRIGOYEN, il n’est que rarement traité dans la fiction. Les comportements exposés par Amélie NOTHOMB dans « Stupeurs et tremblements » n’ont rien d’excusables, mais, teintés d’une culture nippone, ils ne reflétaient pas exactement ce que l’on dénote dans notre monde occidental.
La première à s’y essayer avec succès est Delphine de VIGAN, experte du monde du travail, qui non seulement ambiance son roman dans l’entreprise, mais qui a choisi pour trame de "Les heures souterraines" un processus de harcèlement moral. La victime en est Mathilde, l’assistante d’un Directeur Marketing international, qui, parce qu’un jour elle émet banalement pense-t-elle, une réserve sur la stratégie de son manager, se trouve entraînée dans une spirale silencieuse et inflexible « qui n’aurait de cesse de la faire plier ».
Un phénomène qu’elle subit, qui lui fait perdre le sommeil, et qu’elle n’arrive pas à expliquer à son entourage. Quand elle en parle à ses enfants en adoptant un langage qu’elle croit qu’ils pourront appréhender, elle se rend compte qu’elle raconte « une histoire de schtroumpfs barbares s’entre-tuant en silence dans un village retiré du monde ». Le romanesque de la trame se loge aussi dans le récit de la trajectoire d’un médecin urgentiste que Mathilde rencontrera, mais dans quelles circonstances ?
Quant à la partie scientifique, Delphine de VIGAN, selon Bernard LEHUT de Courrier Cadres, « brosse un tableau remarquable tant du point de vue littéraire que sociologique ».
La jeune femme explique au cours d’une interview, que son expertise provient d’une expérience de 15 ans passés au sein d’un département spécialisé dans l’observation sociale d’un institut de sondage. Elle y assurait pour le compte de grandes entreprises, des enquêtes de climat social, des baromètres sociaux, des études sur les modes de management ou sur les procédures d’évaluation professionnelles. Pendant cette période, elle a pu constater des cas de harcèlement, dont le principal problème est justement qu’ils sont rarement identifiés. Elle ajoute que l’entreprise, si elle peut être un espace « d’épanouissement, de créativité et d’effort collectif, elle est aussi un terreau propice à la violence et à l’impunité.
Les principales victimes de ce harcèlement en ressortent dégradées, mais leurs auteurs aussi, et ceux qui dans l’entourage se taisent, également. A la fin, c’est toute l’entreprise qui en souffre. Le harcèlement n’est malheureusement pas rare, en raison de la pression des objectifs, de la mise en compétition des salariés qui font de l’entreprise un lieu de souffrances, car un lieu privilégié « de mise à l’épreuve de la morale, d’abus de pouvoirs ». On ne sait pas si Delphine de VIGAN a subi elle-même au cours de sa carrière professionnelle un quelconque harcèlement, elle en est désormais préservée, puisqu’elle a abandonné son poste pour se consacrer entièrement à l’écriture. Elle avait rédigé ses 4 premiers romans la nuit, une fois son travail terminé, et rêvait de pouvoir « écrire au grand jour ».

Bibliographie



mercredi 9 mars 2011

Cinéma : les délocalisations en Chine vues depuis l'Italie


Après le film de Gilles PERRET qui traitait des effets causés sur notre économie par les délocalisations,  c'est ensuite le réalisateur italien Gianni Amelio qui traite de la mondialisation dans sa dernière oeuvre. Mais si le film de PERRET nous le faisait vivre depuis la France, l'action de "L'étoile imaginaire", curieusement re-baptisé "L'étoile manquante" par Entreprise & Carrières", se situe dans l'un des principaux pays bénéficiaire des délocalisations.
Le film raconte en effet l'histoire d'un responsable de la maintenance d'un fabricant transalpin de machines-outil qui doit se rendre en Chine après s'être aperçu qu'une des machines qu'il y a expédiée présente un défaut majeur. Afin d'éviter une catastrophe, il part sur le champ, et entame un périple qui l'emménera jusqu'en Mongolie intérieure. Accompagné d'une interprète, Liu Hua, il découvre avec effarement le gigantisme et les mutations profondes qui affectent le pays.

L'étoile imaginaire (La stella che non c'è) de Gianni Amelio, avec Sergio Castellitto, Ling Tai, Angelo Costabile.

Sources : Entreprise & Carrières (2007) et Allociné

lundi 7 mars 2011

Les Ressources Humaines au cinéma et dans la littérature

Sources : Le Monde 2 du 18.02.06 - Telerama - Plus (magazine des abonnés de Canal +) - www.allocine.fr - www.fnac.com.

Sommaire
#01 - Introduction
#02 - Les Ressources Humaines dans les films
#03 - Les Ressources Humaines dans la littérature

#01 - Introduction

Les Ressources Humaines en général, et plus particulièrement les conditions de travail et la souffrance vécue en entreprise, font l'objet de plus en plus souvent d'oeuvres cinématographiques ou littéraires. L'article de Dominique Frétard dans le Monde 2 du 18 février 2006 montre l'intérêt croissant des cinéastes pour les thèmes portant sur la dureté du monde du travail.

#02 - Les Ressources Humaines dans les films


Après Ressources Humaines de Laurent Cantet qui narrait en 2000 le cas de conscience que devait affronter un jeune diplômé chargé d'organiser un plan de licenciement dont l'une des victimes n'est autre que son propre père, c'est Alain Corneau qui adaptait en 2002 le roman d'Amélie Nothomb Stupeur et tremblements qui décrivait les problèmes d'intégration d'une jeune occidentale dans une entreprise japonaise.
En 2005 c'est Costa Gavras qui approche la dure loi du chômage avec Le couperet et plus récemment deux productions reprennent le thème des conditions de travail. C'est d'abord sous l'angle du documentaire avec Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés de Sophie Bruneau et Jean-Marc Roudil, qui ont enregistré dans un hôpital, les consultations de patients malades de leur travail : ouvrière à la chaîne, directeur d'agence, gérante de magasin et aide-soignante confient leur détresse face à la pression, la peur, l'isolement, le manque de reconnaissance, de valeur, de morale.
Au registre de la fiction, c'est Fabienne Godet dans Sauf le respect que je vous dois, qui développe un polar social qui prend source dans les zones grises de l'entreprise. Le rôle titre est interprété par Olivier Gourmet, remarquable en "maître d'apprentissage" dans Le fils de Jean-Pierre et Luc Dardenne, et pour lequel il aura le prix d'interprétation à Cannes en 2002.
On peut également citer The corporation, de Jennifer Abbott et Mark Ashbar documentaire canadien de 2003, diffusé en 2006 sur Canal + et qui compare l'entreprise à un psychopathe : égoïste, menteur se moquant du bien et du mal.

#03 - Les Ressources Humaines dans la littérature


Dans son article, Dominique Frétard rapproche ces différentes oeuvres des travaux de Christophe Dejours, qui a publié entre autres Soufrance en France - La banalisation de l'injustice sociale (Editions du Seuil - 7 €) ou de ceux de Michel Gollac et Serge Volkoff, co-auteurs de Les conditions de travail (Editions La découverte - 8,50 €).
A l'instar d'Amélie Nothomb citée plus haut, les romanciers ne sont pas en reste, et les livres ayant pour décor l'entreprise fleurissent, mais l'un des derniers en date investit plus précisément la Direction des Ressources Humaines.
L'italien Andrea Bajani, dans son dernier roman Très cordialement (Edition du Panama - 14 €) imagine un salarié dont la promotion l'amène à devoir rédiger les lettres de licenciement de ses anciens collègues, autrefois zélés collaborateurs. Il s'acquittera de cette tâche avec un certain cynisme en ponctuant systématiquement ces courriers de "remerciement" d'un lapidaire "Très cordialement".

dimanche 6 mars 2011

325 000 Francs de Roger Vailland : l'industrie plasturgique dans les années 50

Ce livre de Roger Vailland, écrit pendant sa période "communisante" est non seulement passionnant dans son récit, mais également intéressant au titre du regard qu'il porte sur les conditions de travail dans une usine près d'Oyonnax. Le principal personnage, Bernard, 22 ans, s'efforce de conquérir celle qu'il aime grâce à ses talents de sportif, il dispute des courses cyclistes le week-end, et financièrement, en s'acharnant à son poste de travail où il fabrique des carosses corbillards par injection plastique.Sans dévoiler la fin de l'histoire, on peut noter que les conditions de travail joueront un rôle essentiel dans l'issue de 325 000 francs, dont le titre n'a pas été converti en Euros contrairement à 99 Francs de Beigbeder ...